Bonjour à tous,
Voici le 5e article, 4e étape dans la définition du changement, peut-être la plus attendue. En effet, après avoir vu ses raisons, sa temporalité et ses acteurs, arrive maintenant la méthodologie pour le mener à bien.
Mais LA recette pour faire aboutir le changement existe-t-elle ?
N’y a-t-il qu’une seule et unique méthode ?
Vous dire oui, serait vous mentir, mais vous dire non ne serait pas non plus exact. Certes il n’y a pas qu’une façon pour faire évoluer nos structures, mais certains principes de bases restent communs dans tous les cas.
Les théories du changement
Commençons par un peu de théorie pour montrer les différentes approches mises en place (depuis les années 1950) avant de voir leurs points communs :
– Sociologique (modèle de Lewin) : basée principalement sur une démarche de persuasion des intervenants avec des temps d’expérimentation et la création de groupes d’échanges pour une appropriation améliorée du changement. Par ses travaux, Lewin a mis en évidence la résistance au changement.
– Instrumentale (roue du changement de Kanter) : basée sur la mise en processus de la transformation, il s’agit d’une manière de structurer la démarche au travers de 3 grandes phases : la première étant le diagnostic, la deuxième la communication, la dernière l’accompagnement.
– Managériale (modèle de Kotter) : basée sur l’importance de la ligne hiérarchique dans l’appropriation de la démarche. En effet, dans les années 1990, Kotter met en évidence qu’un projet de changement ne suffit pas. Il faut également que les managers y adhèrent, partagent la vision et incitent ses collaborateurs à se mettre en mouvement. Il apporte donc une méthodologie en 8 étapes avec les managers à la tête de celle-ci et en relais.
– Collaborative : basée sur la co-construction du changement afin d’améliorer les résultats de la conduite du changement en internalisant les choix d’orientation
– Stratégique : complément des précédentes permettant une cohérence des différents projets de changement au sein d’une entreprise afin de ne pas déséquilibrer les services.
Les 4 étapes de la conduite du changement
Ainsi, ces différentes approches ne sont pas toutes antinomiques, certaines sont même complémentaires. Mais qu’ont-elles en commun ?
1 / La vision des situations qui vont et qui doivent changer → Préparation
2 / L’adhésion des personnes → Communication
3 / La mise en pratique → Expérimentation
4 / Le retour d’expériences → Conclusion
Je vais donc vous proposer une méthodologie qui va s’inspirer des approches précitées et de leurs points communs. Il ne s’agit bien sûr ici que de grandes lignes qu’il faudra adapter à votre entreprise, à votre secteur et à vos collaborateurs.. Je m’efforcerai d’être synthétique et appuierai mon propos par un exemple personnel.
Ainsi, commençons par la première étape.
1/ La Préparation :
Cette étape est l’une des plus importantes. Il s’agit du moment où nous définissons ce qui doit changer. Il faut en effet que ce changement soit compréhensible, qu’il ait un sens et qu’il puisse parler aux personnes impliquées..
Il s’agit donc d’avoir un diagnostic factuel qui montre qu’ il n’y a pas d’autres choix. Ceci peut se faire par des indicateurs (déjà existants ou à mettre en place) permettant un état des lieux.
Pour cette étape, il n’y a pas de recette. Selon la typologie de votre entreprise, votre service ou vos collaborateurs, elle peut se faire par les managers seuls ou en mode coopératif et participatif.
Comment ou la synthèse du pourquoi, du qui et du quand
Il est donc primordial d’intégrer le Qui, décrit dans mon article précédent, mais également le Quand de mon 3e article. Même si pour le timing, il y a une variable supplémentaire dépendant des individus :
Où en sont nos collaborateurs sur la courbe d’engagement de Kübler Ross (autrement appelée la courbe du changement)[1] ?
Même si il est tentant d’aller vite, il est parfois trop tôt pour entamer un nouveau changement si le précédent n’est pas encore effectif et assimilé.
Il est préférable d’adapter la stratégie de conduite du changement en fonction de cette courbe dans le respect des besoins des participants. Ceci en fait une démarche gagnant-gagnant.
En se basant sur les compétences, l’expérience et des mesures internes, cette étape peut se faire au travers de diagnostics internalisés et/ou externalisés. Cette externalisation peut permettre d’avoir un point de vue différent et complémentaire, une vue d’ensemble de la situation.
Attention à ne pas passer à la suite du processus tant que la démarche n’est pas complètement préparée. Pour faire une analogie, il s’agit des fondations de la Maison Changement et si celles-ci ne sont pas saines, il y a risque d’effondrement.
Exemple d’outils ou de méthode
Mais à quoi doit-on penser lors de la préparation ? On peut appliquer la méthode de communication SCORE [2] en identifiant :
– Le Statut initial,
– Les Causes de l’état initial,
– L’Objectif attendu à la fin du projet,
– Les Ressources nécessaires,
– Les Effets attendus pour les parties prenantes.
Ceci fait le lien avec la deuxième étape.
2/ La communication
L’utilisation de la méthode SCORE permet de factualiser le changement, de l’expliquer, de montrer le cap et la voie à suivre.
Attention, selon les personnes avec qui nous partageons le projet, il faut adapter la communication au niveau d’intervention souhaité et à la typologie de changement mis en œuvre (participatif ou directif).
Cette étape est cruciale. Si la communication n’est pas efficace, l’adhésion au changement fera défaut et mettra en péril tout le processus. Cette étape est souvent bâclée car nous pensons à tort que le besoin de changement est évident et donc inéluctable, mais cette perception n’est pas unanime (cf l’article du Qui).
Exemple
Afin d’illustrer l’importance de la préparation et de la communication, j’utiliserai mon expérience personnelle en tant que responsable d’un service d’Innovation pour lequel les performances opérationnelles n’étaient pas optimales.
J’avais commencé la restructuration de ce service en donnant un cadre et des processus autorisant une souplesse de fonctionnement. L’équipe appréciait ces nouvelles méthodes. Mais elle n’arrivait pas à faire avancer ses projets à la vitesse voulue en partie à cause d’un manque d’implication de services connexes. Cette démarche préliminaire n’était donc pas suffisante pour améliorer les performances du service. J’ai alors poussé mes collaborateurs à réfléchir sur ce qu’ils pouvaient faire individuellement. Mais certains, malgré leur bonne volonté, n’étaient pas prêts à entamer cette évolution. Je n’avais pas suffisamment insister sur la nécessité de transformation, la faute incombant à un manque de préparation et de communication.
Une approche personnelle
Un événement exogène a alors déstabilisé profondément mes collaborateurs entraînant une forte démotivation. J’ai donc « mis à profit » cette situation en les faisant réfléchir sur les objectifs du service et leurs missions. Ainsi, l’exposition de la démarche envisagée, au sein de laquelle ils seraient acteurs, a permis une redéfinition du sens de leur travail. Ceci s’est donc déroulé de la manière suivante :
a/ Redéfinition des valeurs du service
b/ Remise à plat du fonctionnement et des dysfonctionnements du service et des projets
c/ Séminaire avec un intervenant extérieur pour amener une vision étrangère à nos problématiques et permettant de montrer les choses sous un autre angle
d/ Mise en place d’un plan d’actions
L’objectif était clair : Améliorer l’efficacité du service d’Innovation en mettant l’humain au coeur des préoccupations. Pas à pas, j’ai vu évoluer chaque collaborateur. Je les ai vu se remotiver les uns après les autres.
Tout cela devient ( et est devenu) possible grâce à la préparation et à la communication.
Passées ces 2 étapes, il reste donc à mettre en application :
3/ L’expérimentation :
Au cours de la phase de préparation, un plan d’actions aura été identifié pour mettre en mouvement l’ensemble des intervenants directs ou indirects.
Dans le cadre d’un projet collaboratif, ce plan d’actions pourra être adapté de manière participative pendant toute l’expérimentation. Ceci permettra d’améliorer la réactivité et l’efficacité de l’équipe projet et potentiellement de dépasser les objectifs souhaités.
Tout au long du processus de transformation, il est primordial de maintenir la communication en tenant informé de l’avancée de l’expérimentation, en soulignant les résultats obtenus.
Dans mon exemple précédent, les actions identifiées mettaient chaque collaborateur à contribution avec :
– la mise en place d’outils de management visuel,
– la mise en place de correspondants avec les services connexes,
– la co-construction de règles de fonctionnement non abordées au démarrage de la démarche,
– la mise en place d’indicateurs pertinents permettant d’être plus agiles et plus factuels.
Toutes ces actions ont été menées et ont renforcé l’attitude proactive de l’équipe.
Enfin, il ne faut surtout pas oublier la 4e et dernière étape :
4/ La conclusion
Il est important, comme pour tout projet de faire un retour d’expériences sur le changement qui aura été mis en place.
A-t-il porté ses fruits ?
Aurait-on pu faire autrement ? Être plus efficace ?
A-t-on négligé certains acteurs ou facteurs au cours du processus ?
En effet, il est très important de se poser toutes ces questions. Pourquoi ?
Parce que ce ne sera jamais le dernier changement qui interviendra.
Parce que, de chaque projet, nous devons tirer des leçons sur ce qu’il s’est bien ou moins bien passé, pour faire mieux et/ou plus vite la prochaine fois.
Parce que des choses ont peut-être été oubliées lors de précédents changements
Enfin, faire une synthèse permet aussi d’identifier les prochains 20% à changer, voire anticiper les dysfonctionnements à venir.
Par exemple, lors du changement précédemment évoqué, nous avions mené une étude (SWOT[3]) comparative du service avant et après la transformation. Nous avons mis en évidence toutes les forces et opportunités supplémentaires apportées, mais cela nous a également fait ressortir une menace qu’il fallait alors traiter.
Voilà donc, selon moi, la méthodologie nécessaire pour faciliter le changement.
Attention à bien coordonner les changements!
Une précaution est nécessaire malgré tout. Il est très important d’avoir une cohérence dans les différentes évolutions engagées au sein d’une même société. En effet, certaines peuvent être antinomiques. Par cet avertissement, je reviens sur l’approche stratégique du changement qui doit veiller à la cohérence de l’ensemble des démarches de transformation.
Ainsi se finit mon article sur le Comment. Il n’y a donc en effet pas une seule et unique recette, mais bien des grandes lignes qui ne peuvent être complètement généralisées et qui dépendront donc du Pourquoi, du Quand et du Qui.
J’espère ne pas avoir été trop rébarbatif et que j’aurais pu vous éclairer un peu. Je ne détiens toujours pas LA vérité sur le sujet, je serai donc heureux d’échanger avec vous dans les commentaires.
Je vous retrouverai dans mon prochain article sur le Combien.
Merci encore pour votre attention et pour votre confiance. D’ici-là portez-vous bien !
Respectueusement,
Sébastien Vernay
Activateur du changement
[1] https://www.e-marketing.fr/Thematique/academie-1078/fiche-outils-10154/La-courbe-d-apprentissage-du-changement-325580.htm
[2] https://pnlarticles.com/le-modele-score/
[3] https://www.manager-go.com/strategie-entreprise/dossiers-methodes/diagnostic-strategique-swot
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